Transformation organisationnelle : la fonction RH en tant que maître d'oeuvre
Par Marie-Chantal Ledoux, CRHA
La transformation organisationnelle n’est pas une fin en soi, mais plutôt un moyen pour l’organisation de réaliser ses stratégie et donc d’assurer sa pérennité surtout dans le contexte actuel.
Dans un contexte de changement constant, les capacités de l’organisation doivent évoluer et donc se transformer. La transformation organisationnelle n’est pas une fin en soi, mais plutôt un moyen pour l’organisation de réaliser ses stratégies et donc d’assurer sa pérennité. De plus en plus, la fonction RH joue un rôle de premier plan dans la planification des transformations. En plus d’en orchestrer l’exécution, elle influence et facilite les réflexions en amont menant au design des changements requis.
Voyons maintenant quels sont les facteurs de succès pour diriger en amont une transformation organisationnelle.
La rapidité avec laquelle
les organisations doivent s’adapter est de plus en plus grande et le cycle des changements est de plus en plus court. Dans ce contexte, la rapidité avec laquelle une organisation identifiera de nouvelles stratégies en réponse à son environnement et adaptera ses capacités organisationnelles et humaines pour les réaliser constituera un atout majeur de différenciation concurrentielle permettant d’assurer sa pérennité. Selon Peter Cappelli et Anna Tavis, « la
vitesse est la nouvelle monnaie des affaires » (« HR Goes Agile », Harvard Business Review,mars 2018).
Historiquement, la responsabilité d’identifier les stratégies et de mettre en place les capacités pour les réaliser incombait au chef de la direction. Maintenant, la fonction RH est une contributrice majeure pour assurer que l’organisation dispose
des capacités organisationnelles et humaines nécessaires pour identifier et réaliser ses stratégies. D’abord, parce qu’elle dispose d’une vision transversale des enjeux organisationnels, ensuite, parce qu’elle est souvent responsable de la gouvernance en matière de structure organisationnelle et de main-d’oeuvre.
Lorsque les capacités organisationnelles et humaines en place ne sont pas alignées pour réaliser les nouvelles stratégies, elles doivent évoluer, voire se transformer. Selon l’ampleur des changements
requis, nous parlons d’évolution ou de transformation organisationnelle, cette dernière étant un moyen d’assurer la survie de l’organisation plutôt qu’une finalité.
Le leader de la fonction RH joue un rôle de premier plan afin de créer et d’introduire les conditions et les façons de faire favorisant l’évolution, voire la transformation, de l’organisation. En jouant son rôle d’influenceur stratégique, il s’insère en amont de l’exécution
de la transformation organisationnelle et facilite les réflexions
menant au design des changements requis.
Une démarche de transformation réussie repose sur un leadership cohésif, rassemblé autour d’un processus de planification stratégique continu, misant sur la contribution de l’ensemble des acteurs clés
dans l’identification et la révision en continu des stratégies, ainsi que dans leur mise en oeuvre.
Un leadership cohésif
Comme moteur de la transformation, le comité
de direction doit développer une dynamique
de fonctionnement d’équipe et agir de façon
concertée dans l’intérêt de l’organisation et de
sa pérennité. La collaboration entre chacun des
membres est donc essentielle.

Avec la complexité de l’environnement actuel,
entraînée notamment par l’ère numérique, la
mondialisation des marchés, l’évolution des technologies
et la rareté de la main-d’oeuvre, la mise à
profit de chacun des membres du comité de direction
est nécessaire pour articuler une vision systémique
de l’évolution de l’organisation, constituant
la pierre angulaire de toute transformation, autant
dans sa planification que dans son exécution.
À cet égard, la fonction RH agit comme
conseiller stratégique en développement du
leadership en facilitant l’attraction et la rétention
de joueurs détenant l’expertise requise, mais
également en proposant des stratégies pour développer
les fondations permettant à l’équipe
de leadership d’évoluer de façon performante.
Est-ce que les membres ont une bonne connaissance
de soi, de leur impact personnel sur les
autres et du fonctionnement de leur équipe?
Quels sont les membres qui ont une pensée stratégique
et systémique? Lesquels sont des maîtres
de la rigueur et de la mise en oeuvre? Lesquels
sont plus innovateurs? Pour favoriser un travail
collaboratif efficace, le groupe devra miser sur les
forces de chacun et sur les forces collectives du
groupe, et développer des façons de travailler
permettant d’optimiser la performance globale.
« Le plan est un travail en continu. (...) Réservez la première réunion de chaque mois pour une révision du plan. »
(G. Kenny, HBR, 2016)
Stratégie d’entreprise en adaptation au contexte externe
et aux besoins évolutifs de ses clients
La façon dont les organisations réalisent leur planification stratégique
varie grandement d’une organisation à l’autre. Peu d’organisations
disposent d’un processus de planification stratégique formel
et partagé. Les stratégies sont parfois initiées de façon intuitive par
le président ou certains joueurs clés du comité de direction.
La mise en place d’un processus formel, en plus de baser les
réflexions sur des données factuelles, facilitera la participation de tous
les acteurs clés dans la définition de la vision commune et d’ensemble
de l’organisation. Un processus de réflexion partagé, menant à
l’identification des stratégies, permettra d’aligner et de rallier l’équipe
de leadership vers une cible commune. Selon Graham Kenny, « c’est
dans l’élaboration du positionnement de votre organisation que vous
réalisez que, non, nous ne sommes pas tous alignés » (« Strategic
Plans Are Less Important than Strategic Planning », Harvard
Business Review, 21 juin 2016).
Au-delà de l’identification des bonnes stratégies à mettre en place,
cela permettra de mobiliser toutes les expertises dans l’identification
des changements requis pour faire évoluer les capacités organisationnelles,
et donc d’en faciliter la mise en oeuvre de façon plus rapide.
Encore selon Graham Kenny, le processus en soi « fournit une
plateforme à partir de laquelle le changement peut être défini », et « le processus même de la préparation du plan
permet de penser à l’avenir et à l’assemblage des
ressources requises pour y arriver ».
Par ailleurs, les réalités du marché nécessitent
une révision et une adaptation en continu des
stratégies et de leur alignement. Au-delà d’un
cycle annuel ou d’une discussion engendrée par
les événements de marché, le processus de planification
stratégique doit être dynamique et vécu
au quotidien.
À cet égard, la fonction RH devra influencer
l’équipe de leadership pour qu’elle adopte un
processus de planification stratégique dynamique
et en continu, permettant de mobiliser les
acteurs clés.
« Principalement, le leadership de l’entreprise est responsable de (...) construire une vision solide de ce que l’alignement stratégique devrait être pour l’entreprise, (...) concevoir chaque composante de la chaîne de valeur de l’entreprise comme hautement complémentaires les unes des autres. »
– Jonathan Trevor, Harvard Business Review, 12 janvier 2018
Une démarche de réflexion et de mise
en oeuvre structurée
Comme leader de la transformation, la fonction
RH introduira et orchestrera la démarche
de réflexion et, le cas échéant, de mise en oeuvre.
L’alignement de quatre volets est nécessaire,
soit les affaires, l’organisation, les opérations et,
surtout, les personnes. Pour chacun des quatre
volets, trois étapes sont requises, soit le bilan
de l’actuel, le design souhaité et la mise en oeuvre
des changements requis.
Le tableau ci-dessous présente le cadre conceptuel
d’une démarche de transformation, de
la stratégie à l’alignement des personnes. Ce
tableau permettra de se situer et de constituer
une feuille de route de l’alignement.
Selon son contexte et sa réalité, une organisation pourrait opter
pour orchestrer la réflexion par étapes, c’est-à-dire procéder à un
bilan des quatre volets simultanément, pour ensuite élaborer le
design souhaité pour tous les volets, et finalement opter pour une
mise en oeuvre d’ensemble, ou par volet, soit le bilan, le design et
la mise en oeuvre de chaque volet à tour de rôle.
En plus d’orchestrer le processus de réflexion et d’agir comme
maître d’oeuvre du volet organisationnel (particulièrement dans
le design de la structure organisationnelle) et du volet « alignement
des personnes », la fonction RH contribuera à assurer la cohérence
et l’alignement des quatre volets dans la livraison de valeur aux
employés, clients et actionnaires.
Selon David Ulrich, « la façon dont la fonction RH livre de la valeur
aux employés, à l’organisation, aux clients, aux actionnaires et à la
communauté à travers les talents individuels (compétences, maind’oeuvre,
personnes), un leadership traversant l’organisation, et les
capacités organisationnelles (culture, environnement de travail, systèmes) », a beaucoup évolué durant les 20 dernières années (« Human
Resources (HR) Business Partner 2.0 », LinkedIn, 27 mars 2018).
Un cadre d’analyse éprouvé et une démarche rigoureuse faciliteront
l’élaboration de solutions innovantes requérant une évolution
ou une transformation de l’organisation. Les responsables
des fonctions RH sont maintenant bien positionnés pour piloter
les transformations organisationnelles et ainsi agir comme réel levier
de performance d’entreprise.
Source : Revue RH, volume 21, numéro 4, octobre/novembre/décembre 2018.
Ce parcours met de l’avant la synergie des pratiques RH pour provoquer une expérience humaine permettant l’émergence d’une réflexion sur des approches qui sortent des processus standards, et qui amènent l’organisation à se renouveler de façon systémique.
Ce parcours explore différentes thématiques telles que l’attraction, la rétention et la mobilisation de la main-d’œuvre, la diversité et l’inclusion, le développement des compétences et de la relève, ainsi que la mise en place d’une culture d’apprentissage. En définitive, il invite les professionnels RH à repenser leurs pratiques afin de susciter une expérience employé qui s’étend jusqu’au client.
Références bibliographiques
- KENNY, Graham (2016, 21 juin).
« Strategic Plans Are Less Important than Strategic Planning ». Harvard Business Review.
- KENNY, Graham (2016, 6 avril).
« Your Strategic Plans Probably Aren’t Strategic, or Even Plans ». Harvard Business Review.
- TREVOR, Jonathan (2018, 12 janvier).
« Is Anyone In Your Company Paying Attention to Strategic Alignment? ». Harvard Business Review.
- CAPPELLI, Peter et Anna Tavis (2018, mars).
« HR Goes Agile ». Harvard Business Review.
- ULRICH, David (2018, 27 mars).
« Human Resources (HR) Business Partner 2.0 » [Article sur LinkedIn].